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Le tao du migrant - Le blog de Mustapha Harzoune - Page 30

  • La Traversée

    Mouloud Mammeri

    La Traversée

     

    mouloud-mameri-1.jpgMourad journaliste à Alger révolution vient d’écrire un article qui n’est pas du goût des autorités. Quelle importance ? Chez lui l’amertume devance la censure. Désillusionné, trompé sur ce qu’il croyait être depuis sa participation à la lutte pour l’indépendance, la liberté, il refuse de venir remplir son écuelle à l’auge des maîtres. Plutôt l’exil à l’asservissement. Avant l’expatriation, il part pour un dernier reportage dans le Sahara en compagnie de trois autres journalistes d’Alger révolution : Boualem « le chevalier d’Allah », Souad, toute aussi soumise à Dieu, Serge l’ « apparatchik » communiste et Amalia qui travaille pour un journal français.

    Pendant un mois, ils côtoient les Touaregs, apprennent les difficultés de l’administration à imposer l’école ou la pratique de certains métiers jugés déshonorants par une population berbérophones passionnément éprise de liberté. Pour autant, l’action de la machine administrative n’est pas sans effets : la société touarègue se désintègre, des rapports sociaux plurimillénaires volent en éclats.

    Cette « traversée » ne fera qu’accroître l’amertume de Mourad. Elle réveillera en lui quelques vérités ataviques. Les illusions finissent de s’écrouler, l’asservissement est général : asservissement de la rédaction au pouvoir politique ; asservissement de Kamel, l’ex-directeur du journal nommé PDG d’une entreprise nationale (!), à ses nouvelles obligations sociales. Il se travestit en musulman BCBG avec gandoura, babouches, prières, mosquée et chapelet. Il répudie sa femme, Christine, pour son origine étrangère… Asservissement aux idéologies en « carton pâte » ou « carcérales » tels l’islamisme ou le marxisme. Asservissement aussi à ces nouvelles divinités, ces signes extérieurs de richesse que sont les appartements luxueux, les femmes grosses de leurs quincailleries en or, les Mercedes, les cabanons à Alger… Seul le mendiant, affalé au pied de son immeuble, rappelle, dans sa misérable condition, qu’ « un dénuement total fait sa totale liberté ».

    Plutôt que de s'esbigner vers la France, Mourad décide de rejoindre son village natal en Kabylie. Drapé de l’ancestral burnous, il foule à nouveau la terre maternelle où, lassé de toute cette comédie, il tentera d’ « inventer » la paix, la justice et l’amour.

    A travers cette quête de liberté, Mouloud Mammeri dresse, au tout début de la décennie 80, un tableau de la société algérienne où pêle-mêle s’entrechoquent les tentacules d’un islamisme totalitaire, le machisme, les "servitudes volontaires", la désintégration de sociétés et de valeurs ancestrales comme les sociétés kabyles et touarègue, le désenchantement aussi. Le récit est grave, le regard de Mourad est désabusé, parfois sarcastique. Mouloud Mammeri y ajoute quelques touches d’humour.

     

    Edition Plon, 1982

  • Les Chercheurs d'os

     

    Tahar Djaout

    Les Chercheurs d'os


    tahar_djaout.gifLes Chercheurs d’os raconte l’histoire de ces hommes et de ces femmes qui, la guerre finie, s’acheminent à travers l'Algérie indépendante pour exhumer et ramener au village le squelette d’un proche tombé au combat.

    Avec une verve et une causticité remarquables Tahar Djaout assène tout au long de son récit des coups terribles. Aux vieillards par exemple ces « chiffres répugnantes » qui siège à la djemaa, « détenteurs hypocrites d’une sagesse qu’ils ne respectent même pas » ; à ceux qui partent déterrer « un amas d’os à conviction » : « chaque famille, chaque personne a besoin de sa petite poignée d’os bien à elle pour justifier l’arrogance et les airs importants qui vont caractériser son comportement à venir sur la place du village. » Le village, « tyrannique », « avec ses barreaux invisibles », n’est pas épargné. Tahar Djaout dénonce aussi les nouveaux riches, héritiers de l’indépendance, acquise grâce aux sacrifices d’autres : « au code de l’honneur et aux coutumes des ancêtres ils ont substitué un autre code fait de papiers, d’extraits d’actes et d’attestations divers, de cartes de différentes couleurs ».

    Un jeune adolescent s’en va, accompagné d’un parent, Rabah Ouali, à la recherche des restes de son frère. De cette quête macabre, il revient transformé, portant un regard nouveau sur les hommes et sur les choses. « Les mois qui viennent de s’écouler ont été extrêmement révélateurs : ils ont dénudé l’âme des humains, jeté toutes les rapacités et les puanteurs dans la rue, précipité le temps comme une horloge affolée ». En dépit du « précieux butin », le retour est sans gloire.

    Un récit bouleversant, au style sobre et limpide paru en 1984 écrit par un Tahar Djaout âgé de trente-deux ans. Les Chercheurs d’os est un roman d’apprentissage ; toujours d’actualité. A lire aussi bien pour sa dimension locale qu’universelle : à travers les yeux d’un gamin, Tahar Djaout y dénonce les carcans de la tradition et les mensonges de la modernité. A la sauce algérienne et autre.

    Seuil, 1984. Réédition Points, seuil, 2001

     

  • La Gardienne des ombres. Don Quichotte à Alger

    Waciny Laredj

    La Gardienne des ombres. Don Quichotte à Alger

     

    Waciny+Laredj.jpgWaciny Laredj  est né près de Tlemcen en 1954. Professeur de littérature moderne à l'université d'Alger jusqu'en 1994, il s’installe à Paris cette même année suite à des menaces terroristes. Enseignant à l'université de Paris III - Sorbonne nouvelle, il est l'auteur de plusieurs romans écrits en langue arabe, dont cette Gardienne des ombres qui fut son premier texte traduit en langue française par Marie Virolle et Zeineb Laredj.

    Oeuvre littéraire riche et dense, elle prend pour trame les tribulations à Alger d’un lointain descendant de Cervantes pour brosser le tableau kafkaïen d’un pays dominé par les Bent Kalb (la tribu des chiens), c’est tout dire!

    Hanna, une vieille femme aveugle, fidèle à son arrière grand-père, un vieux bibliophile maure d’Andalousie, campe cette magnifique gardienne des ombres. Elle attend “le retour de w’lidi Hamou, le porteur de soleil, qui me fera sortir de cette obscurité pour vivre de nouveau la lumière. Il reviendra ne soyez pas impatients! Un siècle, dans la vie d’un être comme moi, n’est rien du tout”. La mémoire du passé parviendra t-elle à faire reculer l’absurdité ambiante - c’est après ses cinq ans de captivité à Alger que Cervantès entreprend son Don Quichotte qui, justement, égrène les absurdités de ce monde? Ce passé aidera t-il à dessiner les contours d’un horizon plus lumineux? Ce sont là deux des interrogations portées par ce très beau roman. Toujours d’actualité en ce 5 juillet 2012 !

     

    Algérie Littérature/Action n° 3-4, Edition La Marsa, 1996

    Réédition, Aden, 2002

     

     

  • Un si parfait jardin

    Sofiane Hadjadj, Michel Denancé

    Un si parfait jardin

     

    sofiane_hadjadj.jpgSofiane Hadjadj opère dans la figure littéraire. L’Algérie ne se cache pas ici derrière un prénom, une femme, une maison ou un métier à tisser mais prend la forme d’un jardin bien connu des Algérois : le jardin d’Essai du Hamma du côté de Belouizdad (l’ex Belcourt le quartier du jeune Camus).

    Le 21 juin 2003, un mois après le tremblement de terre qui frappa Boumerdès et sa région située à l’est d’Alger, Naghem L., revient dans sa ville natale après dix ans d’absence.  Jeune paysagiste, il a décidé, seul, d’évaluer les dégâts occasionnés par le séisme dans le Jardin d’Essai.

    Fondé en décembre 1832, soit un an et demi seulement après le débarquement, le jardin d’Essai aurait été « l’instrument le plus approprié pour matérialiser la prise de possession du sol et « préparer le terrain » (…) à la venue des colons ». A voir. Mais là n’est pas l’essentiel. Toutes les bonnes et désintéressées intentions de Naghem L. buteront sur les secrets et les intrigues qui, en sous-mains, se trament autour du lieu. L’état du jardin est vite fait : absence d’inventaire, manque de moyens, déni d’un travail sur la mémoire du site, dégradations, multiplication des zones d’ombre quant à l’entretien et à la gestion du jardin, trafics divers, négligence généralisée... C’est la riche histoire de l’Algérie indépendante sur quelques dizaines hectares.

    Les d’abord naïves investigations de Naghem L. finissent par inquiéter. D’autant plus qu’il reçoit l’aide mystérieuse et opportune du Dr Fahci, ci-devant directeur accusé à tort de vol qui tient ses éloquents dossiers à disposition. Les pontes du moment s’empressent de faire disparaître toutes les archives. Autrement dit, du passé faisons table rase, exit la mémoire des lieux et autre vérité historique. Avant nous, il n’y avait rien, après nous, le déluge ! « La mémoire, voilà l’enjeu de notre époque.  Ou plutôt l’absence de mémoire. On veut faire de nous des êtres amnésiques… » dit d’ailleurs le Dr Fahci.

    Comme cette petite histoire ou longue nouvelle signée Sofiane Hadjadj, par ailleurs fondateur des éditions Barzakh, est publiée dans la collection Collatéral, qui croise littérature et photographie, le livre contient aussi des photos de Michel Denancé.

     

    Edition Le bec en l’air, collection Collatéral, 2007, 102 pages, 14,50 €

  • Au zénith

    Duong Thu Huong
    Au zénith

    dth.jpgBien sûr, ce n’est pas l’essentiel du propos de Duong Thu Huong, mais ce récit, consacré aux dernières journées du « Président » Ho Chi Minh et à un implacable examen de conscience, parle aussi de l’exil parisien du père de l’indépendance vietnamienne. « J’ai cherché pour mon peuple un Paris chaleureux et j’ai trouvé un Moscou glacial (…). La France  de Diderot et de Voltaire m’a ouvert ses portes puis l’autre France, celle des képis et des uniformes, me l’a refermée au nez comme un valet aurait claqué la porte d’un château devant un mendiant (…) » dit le Président entre deux évocations nostalgiques de sa période parisienne. Le président est seul. Trahi par ses anciens compagnons de combat. A l’exception de Trân Vu, décrit comme « un homme droit, entier, qui ne se permet jamais d’être étreint par des sentiments qu’il juge médiocre d’après son code moral ».

    « C’est bégayer qu’il faut, au trébuchet de l’âme » dit le poète Abû Nuwâs. Face au «  tribunal de sa conscience », « Le Président » ne bégaie pas. Il reste sans voix ; écrasé par la honte et la culpabilité. Double. Coupable pour avoir trahi la femme qu’il aimait et abandonné ses enfants. Coupable pour avoir conduit son peuple à la ruine et à la dictature. Les apparitions du président Man (Mao) pour qui « le pouvoir ne peut tolérer les sentiments humains » confrontent deux hommes et deux logiques politiques.
    Pour le Grand Timonier, Ho Chi Minh serait devenu le « bon disciple de l’occident » : acculturé, il en aurait oublié les règles et les mentalités de ses frères indigènes. Il serait comme on dit aujourd’hui une « banane » : jaune à l’extérieur mais blanc à l’intérieur…
    Duong Thu Huong est connu pour son combat en faveur de la liberté dans son pays. Au Zénith ne déroge pas à cette thématique : dénoncer avec force ce que les communistes ont fait du Vietnam, une société plus inhumaine encore aujourd’hui qu’hier, en convoquant à ses côtés le Primus inter pares. Mais cela serait trahir l’œuvre de cette femme que de réduire ce roman à un pamphlet. Duong Thu Huong est une conteuse hors pair, une romancière qui tisse et entrelace les histoires et les parcours, une écrivaine qui mêle le conte, le récit historique, la sagesse populaire, la langue classique mais aussi celle, plus verte et cru du peuple.
    Duong Thu Huong montre la profondeur et la diversité - culturelle, historique, humaine - de son pays. Elle s’applique à distinguer ville et campagne, modernité et tradition, et surtout, cultures ancestrales - paysanne ou bouddhique - et les nouvelles règles qui corsètent un peuple et son pays.
    Plusieurs fils narratifs forment le tissus de ce vaste roman : l’introspection du Président, l’histoire de Quang, de son amour et de sa fidélité à Ngân malgré la jalousie de son fils aîné. Quang est pour « Le Président » un « miroir » qui le renvoie à sa conscience tourmentée. Lui a abandonné Xuân, la femme qu’il aimait, pire, il n’a rien dit quand des responsables du parti – ce parti qu’il à lui-même crée - décidèrent d’assassiner Xuân. Trois hommes restituent cette terrible histoire : « Le Président », Vu, l’ami fidèle, qui prendra soin des deux enfants du « grand frère » et le « compatriote inconnu », le beau-frère de Xuân qui a juré de la venger.
    Duong Thu Huong n’est pas tendre pour les siens quand elle évoque les mentalités paysanne et les « vices » de son peuple à commencer par le premier d’entre eux, la jalousie : « le sentiment traditionnel du peuple vietnamien ». Mais, a contrario, elle loue la sagesse populaire, ces « valeurs culturelles populaires » détruites par le nouveau régime qui a conduit au fiasco, « du point de vue sociologique, la Révolution a fait remonter la vase à la surface de l’eau ».
    Malgré le thème de l’amour, omniprésent chez Duong Thu Huong, Au Zénith est une sombre réflexion sur l’âme humaine, l’envie, la jalousie, le pouvoir et sur le temps qui  « transforme tout en illusion », en « pourriture » !
    Le Président décide de mourir le 2 septembre 1969 comme un présage… pour mettre « fin à ce régime traitre et cruel » et exterminer « les démons qui sucent le sang du peuple ».

    Traduit du vietnamien par Phuong Dang Tran. Edition Sabine Wespieser 2009, 787 pages, 29€

  • Les Invités


    Pierre Assouline
    Les Invités

    963752671.jpgPierre Assouline, journaliste, romancier, essayiste, biographe (Marcel Dassault, Simenon, Gaston Gallimard, Jean Jardin, Kahnweiler, Albert Londres ou encore Hergé) et blogueur à succès, aborde avec Les Invités la difficile question de l’identité, du rapport à l’Autre, des préjugés qui aveuglent et des imaginaires nationaux, désuets et poussiéreux, qui emprisonnent et blessent les nouveaux venus.
    Tout cela est traité de manière originale : un dîner. Un diner au coeur du VIIe arrondissement de Paris, où s’épanouit, hautaine et dominatrice, une grande bourgeoisie fière de donner le la des us et coutumes de  la nation.
    Ce soir, ce sont Sophie du Vivier  et son époux Thibault qui régalent. Ils ont convié Stanislas Sévillano, « célibataire confirmé » ; « Son-Excellence-Alexandre » et sa femme Marie-Do ; Erwan et Sybil Costière, de la belle graine de nouveaux riches, « formatés plutôt que formés » ; Les Le Châtelard, lui Adrien, avocat de renom,  et elle, Christina, « La présence » énigmatique… George Banon campe un industriel canadien avec qui Thibault souhaiterait bien conclure un contrat. Joséphine, directrice de programme sur une chaine câblée incarne le monde peu flatteur des médias. Enfin, pour ce texte, spirituel et littéraire à souhait, Les Dandieu, écrivain membre de l’Académie française….
    Sans oublier Sonia, la bonne ! Ainsi prénommée par sa patronne qui trouve son prénom imprononçable et sans doute bien malséant : OumelKheir
    Pour ne pas être treize à table, elle se retrouve au milieu des convives qu’elle était, quelques minutes auparavant, sensée servir et desservir. Très vite, sous les traits de Sophie, Oumelkheïr sera démasquée par la perfide Marie-Do. La prouesse d’Assouline est d’avoir transposé autour de cette table les tensions intérieures, les pressions subies, les peurs et les angoisses, mais aussi le regard distancé, amusé, parfois moqueur de l’étranger, de l’immigré ou du Français « de branche » candidat à une communauté de destin national avec ces Français de souche ; ou supposés tels.  Ici c’est la France qui est à table, tandis que le clandestin s’active et ronge son frein en cuisine. Une France qui refuserait de se voir et de se reconnaître pour ce qu’elle est devenue depuis des lustres. Le conflit de classe s’emberlificote donc dans l’arantèle identitaire
    Bien sûr, Sonia-Oumelkheir, qui n’aspirait à rien d’autre qu’à la paix, occupera le centre des discussions. Cette Française, aux lointaines origines marocaines, née à Marseille du côté de l’Estaque, en remontrera  à ses commensaux d’un soir. Mais, que de pressions et d’anxiétés ! Il lui faut être à la hauteur, de pas choquer, ne pas risquer de perdre sa place. D’être renvoyée ! En silence, elle essuie les incompréhensions, les fautes de goût, les rebuffades, les cruautés. Pour une furtive complicité, combien de honte bue, de paroles restées coincées au travers de la gorge, de vexations, de doigts de pieds tordus plutôt que de « laisser échapper un cri, un mot, une humeur ».
    Les sujets autour de Sonia n’étonneront pas : la prononciation impossible de son exotique prénom ; les passe-droit et autres « discriminations » positives offerts aux « pauvres » qui, comme elle, réussissent à se hisser au-dessus de la mêlée. Et d’ailleurs, est-elle entièrement française ? La culture ou le pays d’origine réduits à un exotisme touristique, de même que les immigrés et leurs descendants français se voient réduit à une population arabe et musulmane : « tout ça c’est pareil ! ». Rien ne sera épargné à la jeune femme, jusqu’au :« et vous vous plaisez chez nous ? » Encore et toujours considérée au mieux comme une invitée au pire comme une intruse. Viennent ensuite les poncifs sur la langue arabe réduite à des « appels au meurtre ou à l’apologie de la terreur » (il faut relire Assia Djebar) et bien sûr, incontournable : l’islam, l’excision, la circoncision, les vertus comparés du métissage à la canadienne et de l’intégration à la hussarde républicaine, le regroupement familial, les « victimes professionnelles » et autre dénigrement des médecins diplômés à l’étranger qui officient  à l’hôpital public…
    Comme le confie Banon à Sonia : « votre présence  a fait sortir des choses qui ne sortent jamais. Tout ce que la société enfouit en espérant que jamais personne n’aura le mauvais goût de le déterrer. Il suffit de pas grand-chose. Treize et puis… Toute la poussière sort, fait tousser, étouffe… »
    Qu’importe, pour Sonia : « l’âme de la France, ç’a toujours été ses étrangers. Ce sont eux qui la rappellent à sa grandeur, car ils l’aiment pour ça. Il faut toujours en faire plus que les Français pour espérer devenir pleinement français sans se renier pour autant. C’est comme ça que ses « étrangers » tirent ce pays vers le haut. »

    Tout cela est féroce mais pas univoque. Assouline est trop subtil pour réduire ses personnages à des caricatures. Dans cette « comédie des masques », la fin de soirée laissera entrevoir quelques bien humaines fragilités.

    Gallimard, 2009, 207 pages, 17,90€

  • De Niro’s Game

    Rawi Hage
    De Niro’s Game

    hage_rawi.jpgLe contenu d’une valise ou d’un sac de clandestin que vomit nuitamment un cargo dans une ville encore endormie livre quelques détails sur celui qui débarque. Dans son sac, Bassam, a emporté un revolver, de l’argent et un chandail de laine. De cette arme, il est facile de déduire que l’homme vient de quitter ou de fuir un quotidien de violence. L’argent pourrait être le fruit de quelques économies ou le résultat d’un larcin. Le chandail tricoté à la main rappelle sans doute le don d’un être cher. Une mère ? Une sœur ? Une épouse ?
    Dans De Niro’s Game, Rawi Hage, raconte avec une force étonnante pour un premier roman, l’histoire de Bassam et de Georges, son ami d’enfance. Ils sont Libanais. Chrétiens de Beyrouth. Le Beyrouth de la guerre civile et des bombes. Cette chronique est celle des bombardements, des immeubles éventrés, de la mort et de la solitude, des luttes entre factions armées, celle aussi des seigneurs de guerre qui engraissent et engrangent  sur le dos de martyrs shootés à l’idéologie et à la cocaïne ou de pauvres bougres bien obligés de remplir la gamelle familiale. Rawi Hage laisse deviner la sauvagerie des milices qui déciment le camp palestinien de Sabra et Chatila ; le terrorisme en complet veston et robe de soirée des responsables israéliens ; l’exploitation des immigrés égyptiens par les milices…
    Mais cela n’est que la toile de fond de ce récit. Rawi Hage raconte l’histoire de deux hommes. Bassam et Georges. Deux amis d’enfance que la guerre - ou la vie - va séparer. Deux amis qui filent sur la moto de Georges dans une ville noyée sous une pluie de bombes. Nos deux compères échafaudent des plans pour se faire du fric. Ils détournent de l’argent de la salle de jeux où travaille Georges. Bassam livre du mauvais whisky au secteur musulman de la ville. Ensemble, ils lèvent beaucoup moins de filles qu’ils ne vident de bouteilles. Georges est un bâtard, élevé par sa seule mère ce qui est loin d’aller de soi dans une société patriarcale...  Bassam, l’Arménien, vit avec sa mère et fricote ave Rana. Mais même dans une ville en ruine, derrière les murs délabrés, les yeux continuent de surveiller les hymens des jeunes femmes, les « longues langues » s’insinuent sous toutes les portes, sous toutes les jupes.
    Bassam veut quitter Beyrouth, « laisser cette terre à ses démons », ce pays où « dix mille cercueils dormaient sous la terre et au-dessus, les vivants dansaient toujours, les bras chargés d’armes à feu. » Georges, lui, s’enfonce, un peu plus dans la guerre, la violence et l’autodestruction. Bassam, surnommé Majnoun (le fou), n’est ni un tendre, ni un faible… Heureusement. Pourtant, le soutien et la protection de Nabila, la tante de Georges, lui seront utiles. A Paris, dans un univers de manipulations, d’espionnage et d’agents de renseignement, il retrouve la sœur de Georges, c’est elle qui lui apprend l’histoire du père absent.
    L’écriture de Rawi Hage est métallique et sensuelle, âpre, rugueuse et pourtant fluide car emportée par un torrent violent gros de la bêtise des hommes, ces « chiens humains, [ces] chiens portant masques d’hommes, [ces] chiens armés de fusils (…) », un torrent qui emporte tout sur son passage : le beau comme le laid, l’amour comme la haine, la fraternité des camps opposés comme la cruauté des assassins. Ce récit de guerre au réalisme cru nimbé de bouffées de rêve et de bouffées fantastiques prend des airs de polar et de secrets de famille.
    De Niro’s game balance entre Voyage au bout de l’enfer de Michael Cimino et Albert Camus. Bassam est un homme absurde celui qui, pour paraphraser l’auteur du Mythe de Sisyphe, par le seul jeu de sa conscience, transforme en règle de vie ce qui était invitation à la mort - et refuse le suicide.

    Traduit de l’anglais (Canada) par Sophie Voillot, édition Denoël 2008, 267 pages, 20€

  • Leconte de Lisle ou la passion du beau

    Christophe Carrère
    Leconte de Lisle ou la passion du beau

    20704827_2308419.jpgCette biographie, pointue et méticuleuse, que Christophe Carrère consacre à celui que nos vieux manuels affublent du triste titre de « prince des Impassibles »,  dépoussière heureusement nos représentations sur l’homme et son œuvre. A bien des égards et a contrario de l’officielle caricature, ce Charles Leconte de Lisle, né un 22 octobre de l’année 1818 et mort le 17 juillet 1894, apparaît comme un être fragile et amoureux, à commencer de sa cousine, Marie-Elixène de Lanux, partie si jeune et qui toujours restera sa muse. Un homme souvent sympathique, clairvoyant et même drôle. Dans son œuvre - Poèmes antiques (1852), Poèmes barbares (1862) et Poèmes tragiques (1884) (1) - voisinent le polythéisme grec puis hindouiste, son île de la Réunion, la nature et la faune, les soubresauts et les bassesses d’un siècle où l’argent devient roi, les flèches tirées sur les tartuffes et autres bondieuseries. Leconte de Lisle se révèle à la fois d’une actualité étonnante et d’une exigence qui, elle, semble appartenir à un autre temps.
    Christophe Carrère écrit que Leconte de Lisle est « un être métissé, morcelé, fragmenté, brisé, un poète immigré, moderne parce que bigarré, pluraliste et nomade, à dimension universelle. » Il veut en finir avec « la légende, pourtant combattue depuis les origines par les amis du poète et par le poète lui-même, de l’impassibilité élitiste, de la condescendance olympienne ».
    Cet être fragmenté a passé son enfance et une partie de sa jeunesse entre l'île Bourbon natale, l’actuelle Réunion,  et la  Bretagne, du côté de Rennes (Dinan) avant de s’installer à Paris en 1845. Fils de colon, il s’engagera pourtant aux côtés de Victor Schoeler contre l’esclavagisme.
    Anticlérical, il fustige « les paradoxes de cette orthodoxie (catholique) qu’il avait vue s’épanouir dans la vie culturelle des créoles de Bourbon, et notamment chez sa mère, catholique fervente, qui ne s’était jamais attendrie du sort des esclaves aux oreilles coupées, aux mains tranchées, aux jarrets sectionnés (…) ».
    Très tôt, le jeune Charles cru en sa vocation poétique mais c’est bien tard, que le vieillissant Leconte de Lisle reçu quelques lauriers. Le chef de file des Parnassiens comptera pour principaux disciples le fidèle Hérédia, Villiers de l'Isle-Adam, Léon Dierx, Sully Prudhomme et Mallarmé. Il fut reconnu par ses pairs  -  y compris par ceux qui comme France, Verlaine, Mallarmé ou Baudelaire s’en écartèrent - comme l’un des plus grands poètes de sa génération. Pourtant une longue partie de sa vie, il eut à se débattre contre une angoissante et tenace pauvreté.  L'Empire lui accorda bien une pension et le décora même. Mais outre que cela lui fut reproché à la chute du « petit » Napoléon, ces maigres subsides ne lui permirent pas de vivre à l’aise et de subvenir au besoin des siens. La République le fit sous-bibliothécaire au Sénat et le nomma officier de la Légion d'honneur. En 1886, après s’être enfin résolu - plié - aux protocolaires visites, Leconte de Lisle fut élu à l’Académie française, au fauteuil 14, celui de Victor Hugo.
    Pourtant perspicace, la politique ne fut pas son fort. Fouriériste à ses débuts, il délaissa ses premiers engagements pour un socialisme bon teint et une fibre républicaine. Il finira même par s’insurger contre le dogme fouriériste « pour s’orienter vers la route claire de la pure et simple beauté. » Car cet homme épris d’idéal et de hauteur fut déçu. « Il fallait renoncer à la politique qui (…) n’était pas faite pour les poètes ». Les masses sont stupides – comme les politiciens. Il deviendra même un anti-communard que Verlaine cessera de fréquenter pour cette raison.
    Pour son biographe, « loin de le blâmer d’être entré – si peu – dans l’arène politique, il convient donc de le féliciter d’en être si vite ressorti. De fait, sa supériorité sur Ménard vient de la rapidité avec laquelle il a choisi l’échec (…). Leconte de Lisle ne subit pas l’échec à la manière de Flaubert : il le prend pour thème poétique et comme conversion à l’Idéal. » C’est ainsi qu’il va peu à peu, explique Christophe Carrère, « ne s’attacher qu’à la seule beauté qui fut à la fois moralement unique et esthétiquement multiple, celle de la forme ».
    Voici donc une biographie pointue, où l’intimité du poète voisine avec les fracas de ce bruyant XIXe siècle. L’un des nombreux intérêts de ce travail est de ne pas chercher à masquer les contradictions, les évolutions, l’absence de logique de système chez cet esprit rétif à toutes représentations figées qui, pour autant, ne galvauda jamais certains principes et ne prostitua aucune de ses valeurs.
    « L’homme que j’étais n’aura jamais été connu », disait Leconte de Lisle de lui-même. Suivons pourtant Christophe Carrère dans sa tentative de lever le voile sur la double nature du poète, celle du « paria, proscrit des lettres françaises et de personnage créole tourmenté entre deux natures, la blanche et la noire, la libre et l’asservie, la républicaine et l’aristocratique, la parisienne et la saint-pauloise, la très secrète et la plus célèbre ». « Si Charles revêtait un masque, Leconte de Lisle, lui, en affichait bien mille ».


    1- Tous disponibles en poche chez Gallimard dans la collection « Poésie ».

    Éditions Fayard, 2009, 677 pages, 34 €

  • Foujita, Le maître du trait

    Anne Le Diberder (Textes)

    Foujita, Le maître du trait


    foujita2.jpgNé en 1886 à Tokyo, étudiant à L’École des beaux-arts de la capitale nipponne, Tsuguharu Foujita arrive à Paris en 1913. Dans le Paris cosmopolite de l’entre-deux guerres, il rencontre Picasso, Modigliano, Soutine… Il souffle alors sur la capitale française un vent de liberté porté par ces artistes débarqués des quatre coins du monde et qui se retrouvent autour du quartier Montparnasse. En 1920, il expose au Salon d’automne. Le public peut y découvrir ce que seront les principaux thèmes de son œuvre : nus féminins, portraits, chats, paysages et rues de Paris, scènes d’intérieur… Foujita a déjà commencé à « allier la rigueur du trait japonais à la liberté de Matisse » et surtout à mettre au point son fameux « traitement » de la toile, ses mystérieux fonds blancs qui étonneront Picasso. Le lecteur apprendra que ce mystère est aujourd’hui levé grâce à la restauration par le Conseil général de l’Essonne, entre 2001 et 2007, des cinq grandes compositions dont il est propriétaire.
    Un brin dandy, le plus parisien des peintres japonais et le plus japonais des peintres français, deviendra une figure incontournable du tout Paris. Mais ce dandysme affiché n’est qu’une apparence : Foujita est un travailleur acharné, un curieux à l’œuvre déjà forte et un infatigable créateur qui n’a cessé de jeter des ponts entre des traditions culturelles différentes. Après un tour du monde de trois ans, commencé en 1931, suivi d’un séjour au Japon de six, Foujita revient en France en 1939. Surpris par la guerre, il rentre au Japon. C’est en 1950, soit quelque vingt années après son départ,  qu’il retrouve Paris.  Cinq ans plus tard, Foujita obtient la nationalité française et en 1959, il se convertit au catholicisme. Il choisit de se prénommer Léonard en hommage à Léonard de Vinci. « Chantre entre les deux guerres de la beauté féminine voluptueuse, Foujita, dans les années 50, prend le parti des « verts paradis des amours enfantines » avant de se consacrer à la peinture religieuse. Il passera les dernières années de sa vie dans sa maison-atelier de Villiers-le-Bâcle, dans la Vallée de Chevreuse, une maison devenue depuis musée. Il y meurt le 29 janvier 1968.
    30.jpgFoujita, le maître du trait est un très beau livre, magnifiquement illustré par des tableaux de l’artiste et des photos,  le tout présenté par Anne Le Diberder, attachée de conservation au Conseil général de l’Essonne. « Foujita inventait une œuvre tout en transparence, parfois plus proche du dessin que de la peinture. Son art a suscité autant d’interrogations que d’admiration, tant la mise en œuvre semblait étrangère au savoir-faire occidental. » Sans jamais jargonner, Anne Le Diberder donne à lire et à voir les œuvres du maître. Elle explique les ressorts techniques et l’originalité des créations, la fusion de la peinture à l’huile occidentale  et de celles des estampes japonaises. Tout est passé en revue, disséquer : techniques des aplats, monochromie, fonds blancs opalescents, rendu des modelés, finesse et élégance du trait… Anne Le Diberder a su aussi restituer les créations de Foujita dans l’histoire personnelle du peintre, suivre les traces des filiations culturelles, l’influence ou les résonnances du contexte socio-historique.
    Tsuguharu Foujita a inventé une technique, une façon de peindre et de dessiner qui lui est propre, mêlant l’apport de la peinture occidentale à sa culture d’origine, à l’art notamment des estampeurs. Faut-il parler de « métissage » ? C’est avec prudence que le mot est utilisé dans l’ouvrage. Les créations de Foujita inscrites dans une double culture relèvent d’une dialectique dont la synthèse débouche sur une œuvre nouvelle, une œuvre en soi, irréductible à ces seuls constituants d’origine. Une œuvre unique, « personnelle »,  sans inspirateurs directs ni héritiers proclamés.

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    Edition Philippe Picquier, 2008, 206 pages, 29,50

  • Cartes postales de l’enfer

    Neil Bissoondath
    Cartes postales de l’enfer

    108150-neil-bissoondath-croule-france-critiques.jpgEt si, une nouvelle fois, un détour par Shakespeare pouvait éclairer nos contemporains ? Qui plus est, sur un sujet peut-être surprenant : celui de l’identité. L’identité perçue comme un jeu de rôles, avec ses masques, ses préjugés, ses secrets, ses méandres, ses compositions kaléidoscopiques, voire ses fragilités et souffrances schizophréniques. “All the world’s a stage and all the men and women merely players”, cette citation extraite de Comme il vous plaira est au cœur du nouveau roman de l’auteur de Tous ces mondes en elle (Éditions Boréal et Phébus,1999). C’est avec originalité que Neil Bissoondath, professeur à l’université Laval à Québec, renouvelle son approche des questions identitaires. Il n’est plus seulement question ici de l’identité de ces hommes et de ces femmes ballotés sur plusieurs générations par la mobilité moderne et les migrations contemporaines. Comme si, in fine, cette question des identités composites et des identités “de relation” (Édouard Glissant) ne devait plus se confiner au seul espace des migrations et ne concerner que les immigrés. Neil Bissoondath étend le propos, universalise la question : derrière chaque individu, du plus “enraciné” au plus “vaporeux” se cache une construction, un “bricolage”, un personnage fait de secrets. Cartes postales de l’enfer se décline en trois temps. Il y est d’abord question de deux univers identitaires, avec, au centre de l’un, les secrets d’une réussite professionnelle et, au cœur du second, les secrets d’une origine immigrée et de la différence culturelle. Lorsque dans un troisième et dernier temps, ces deux univers se rencontreront, ils se télescoperont.

    Très tôt, le personnage qui se fait appeler Alec se découvre un talent pour la décoration d’intérieur. Mais voilà, selon les préjugés en vogue, un bon décorateur ne peut être qu’homosexuel... Aussi, pour réussir, Alec s’organise pour faire croire à sa clientèle que tel est le cas. Rien dans sa vie publique ne doit venir contrarier cette image et ces représentations. Il multiplie les secrets. Les petits comme les grands. “Je voue mon existence à la promotion de mon entreprise et à la protection de mon image”, reconnaît-il. Il devra sa formidable réussite professionnelle autant à ses mensonges qu’“aux rites hypocrites qui font tourner la roue de la société”. Lorsqu’il est question de ses parents, la critique sociale pointe : “Ma vie ne donne peut-être pas l’impression d’être heureuse, mais c’est celle que j’ai choisie, qui me comble et qui, oui, me rend en général heureux – plus, en tout cas, que ne l’ont été mes parents. Ils n’avaient jamais rien choisi, eux (...)”. Alec parle à la première personne, assume pleinement ses choix identitaires. Une identité construite et outil de liberté.

    Après l’identité-liberté d’Alec, le lecteur découvre l’identité-subie et peut-être l’identité-prison de Sumintra, la fille d’immigrés indiens. Ici, le “je” narratif a disparu. Sumintra navigue entre la tradition, incarnée par ses parents, et quelques membres de la communauté indienne d’une part, les us et coutumes de la société américaine de l’autre ; entre devoir et respect du groupe et aspirations individuelles. Kelly est sa meilleure amie. “Kelly, cependant, appartient à un monde et ses parents à un autre. Sumintra, qui va et vient avec aisance entre eux, n’a aucune intention de les mélanger.

    Neil Bissoondath connaît bien le monde de l’immigration. Il évoque la crainte du gendarme  - toujours présente, même quand on a rien à se reprocher - ou les sacrifices consentis pour les études des enfants. Le père, ici, se montre plus souple, plus permissif que son épouse. D’ailleurs, Sumintra “admire sa capacité à absorber l’influence du monde qui l’entoure. Sa mère, dont l’univers se limite pour l’essentiel à la maison et au temple, en est totalement dépourvue, et Sumintra se réjouit à l’idée d’avoir hérité ce trait de son père.

    C’est par Kelly que Sumintra découvre cette “autre façon de voir les choses”. Son amie l’initie même aux joies du plaisir individuel, lui offrant pour son anniversaire un “vibrator”... Le plaisir sexuel et, tabou absolu, le plaisir sexuel féminin, comme figure de l’émancipation de l’individu vis-à-vis des obligations du groupe.

    Quand Alec croise Sumintra sur le stand de rafraîchissements qu’elle tient avec son père dans une manifestation pour collectionneurs de voitures anciennes, l’attrait de l’un pour l’autre est irrésistible. Ils se reverront. Lui se fera appeler Alec, et elle Sue. Ils se masqueront l’un à l’autre leurs petits et grands secrets. Chacun devenant même le secret de l’autre. Jusqu’au jour où Sue décidera de sortir de l’ombre pour vivre en pleine lumière... “Je cherche un endroit où je pourrai être moi-même, seulement moi-même, tout le temps” dit Sumintra à son amie Kelly. Sumintra pourra-t-elle s’extraire de la prison de ses secrets et s’inventer un nouveau rôle ? Alec se révèlera-t-il le maître ou la victime de ses propres mensonges ?


    Traduit de l’anglais (Canada) par Lori Saint-Martin et Paul Cagné, Phébus, 2009, 217 pages, 19,50 €