Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Cartes postales de l’enfer

    Neil Bissoondath
    Cartes postales de l’enfer

    108150-neil-bissoondath-croule-france-critiques.jpgEt si, une nouvelle fois, un détour par Shakespeare pouvait éclairer nos contemporains ? Qui plus est, sur un sujet peut-être surprenant : celui de l’identité. L’identité perçue comme un jeu de rôles, avec ses masques, ses préjugés, ses secrets, ses méandres, ses compositions kaléidoscopiques, voire ses fragilités et souffrances schizophréniques. “All the world’s a stage and all the men and women merely players”, cette citation extraite de Comme il vous plaira est au cœur du nouveau roman de l’auteur de Tous ces mondes en elle (Éditions Boréal et Phébus,1999). C’est avec originalité que Neil Bissoondath, professeur à l’université Laval à Québec, renouvelle son approche des questions identitaires. Il n’est plus seulement question ici de l’identité de ces hommes et de ces femmes ballotés sur plusieurs générations par la mobilité moderne et les migrations contemporaines. Comme si, in fine, cette question des identités composites et des identités “de relation” (Édouard Glissant) ne devait plus se confiner au seul espace des migrations et ne concerner que les immigrés. Neil Bissoondath étend le propos, universalise la question : derrière chaque individu, du plus “enraciné” au plus “vaporeux” se cache une construction, un “bricolage”, un personnage fait de secrets. Cartes postales de l’enfer se décline en trois temps. Il y est d’abord question de deux univers identitaires, avec, au centre de l’un, les secrets d’une réussite professionnelle et, au cœur du second, les secrets d’une origine immigrée et de la différence culturelle. Lorsque dans un troisième et dernier temps, ces deux univers se rencontreront, ils se télescoperont.

    Très tôt, le personnage qui se fait appeler Alec se découvre un talent pour la décoration d’intérieur. Mais voilà, selon les préjugés en vogue, un bon décorateur ne peut être qu’homosexuel... Aussi, pour réussir, Alec s’organise pour faire croire à sa clientèle que tel est le cas. Rien dans sa vie publique ne doit venir contrarier cette image et ces représentations. Il multiplie les secrets. Les petits comme les grands. “Je voue mon existence à la promotion de mon entreprise et à la protection de mon image”, reconnaît-il. Il devra sa formidable réussite professionnelle autant à ses mensonges qu’“aux rites hypocrites qui font tourner la roue de la société”. Lorsqu’il est question de ses parents, la critique sociale pointe : “Ma vie ne donne peut-être pas l’impression d’être heureuse, mais c’est celle que j’ai choisie, qui me comble et qui, oui, me rend en général heureux – plus, en tout cas, que ne l’ont été mes parents. Ils n’avaient jamais rien choisi, eux (...)”. Alec parle à la première personne, assume pleinement ses choix identitaires. Une identité construite et outil de liberté.

    Après l’identité-liberté d’Alec, le lecteur découvre l’identité-subie et peut-être l’identité-prison de Sumintra, la fille d’immigrés indiens. Ici, le “je” narratif a disparu. Sumintra navigue entre la tradition, incarnée par ses parents, et quelques membres de la communauté indienne d’une part, les us et coutumes de la société américaine de l’autre ; entre devoir et respect du groupe et aspirations individuelles. Kelly est sa meilleure amie. “Kelly, cependant, appartient à un monde et ses parents à un autre. Sumintra, qui va et vient avec aisance entre eux, n’a aucune intention de les mélanger.

    Neil Bissoondath connaît bien le monde de l’immigration. Il évoque la crainte du gendarme  - toujours présente, même quand on a rien à se reprocher - ou les sacrifices consentis pour les études des enfants. Le père, ici, se montre plus souple, plus permissif que son épouse. D’ailleurs, Sumintra “admire sa capacité à absorber l’influence du monde qui l’entoure. Sa mère, dont l’univers se limite pour l’essentiel à la maison et au temple, en est totalement dépourvue, et Sumintra se réjouit à l’idée d’avoir hérité ce trait de son père.

    C’est par Kelly que Sumintra découvre cette “autre façon de voir les choses”. Son amie l’initie même aux joies du plaisir individuel, lui offrant pour son anniversaire un “vibrator”... Le plaisir sexuel et, tabou absolu, le plaisir sexuel féminin, comme figure de l’émancipation de l’individu vis-à-vis des obligations du groupe.

    Quand Alec croise Sumintra sur le stand de rafraîchissements qu’elle tient avec son père dans une manifestation pour collectionneurs de voitures anciennes, l’attrait de l’un pour l’autre est irrésistible. Ils se reverront. Lui se fera appeler Alec, et elle Sue. Ils se masqueront l’un à l’autre leurs petits et grands secrets. Chacun devenant même le secret de l’autre. Jusqu’au jour où Sue décidera de sortir de l’ombre pour vivre en pleine lumière... “Je cherche un endroit où je pourrai être moi-même, seulement moi-même, tout le temps” dit Sumintra à son amie Kelly. Sumintra pourra-t-elle s’extraire de la prison de ses secrets et s’inventer un nouveau rôle ? Alec se révèlera-t-il le maître ou la victime de ses propres mensonges ?


    Traduit de l’anglais (Canada) par Lori Saint-Martin et Paul Cagné, Phébus, 2009, 217 pages, 19,50 €

  • 1931, Les Étrangers au temps de l’Exposition coloniale

    Laure Blévis, Hélène Lafont-Couturier, Nanette Jacomijn Snoep, Claire Zalc (sous la direction)
    1931, Les Étrangers au temps de l’Exposition coloniale

    1931-colonie-.jpg

    1931, l’année donc de l’Exposition coloniale. Célébration grandiose de l’empire et de la geste coloniale orchestrée par le maréchal Lyautey soi-même. La Porte Doré et le lac Daumesnil pour un théâtre d’expositions de 110 hectares. Succès total pour cette manifestation qui, du 6 mai au 15 novembre, accueillit pas moins de 8 millions de visiteurs pour 33 millions de billets vendus.
    La France populaire se presse, curieuse et goguenarde, à la rencontre de l’Autre mis en scène. Dehors, l’ombre du repli sur soi et du racisme obscurcit l’horizon national et singulièrement celui des immigrés. Ce n’est pas le moindre des paradoxes d’un temps qui, à bien lire ce catalogue de l’exposition présentée à la Cité nationale de l’histoire de l’immigration, en recèle un bon nombre. Tandis que l’Exposition coloniale participe de la négation de l’identité des « indigènes », la crise fait sentir ses effets d’abord sur les travailleurs immigrés. Pourtant, indigène et immigré s’apprêtent à devenir les acteurs essentiels de l’histoire nationale, les incarnations des transformations profondes à venir. Et pour longtemps.
    Pour les maîtres d’œuvre,  « à cette date se cristallisent d’une certaine manière les liens entre immigration et colonisation ». 1931 serait une « année charnière », héritage à la fois des mobilisations de la Grande Guerre et des vagues migratoires des années 20 et annonciatrice des bouleversements à venir.  Un temps aussi où l’indigène fait son entrée dans l’univers de la migration. 1931 cristallise enfin bien des paradoxes de la société française quant à son rapport à l’Autre, fut-il immigré européen ou indigène du vaste empire.
    En 1931 l’immigration en provenance de l’Empire ne représente que 150 000 immigrés sur les 2 890 000 immigrés présents dans l’Hexagone soit 7 % de la population. L’immigration, majoritairement européenne, c’est-à-dire italienne, belge, espagnole, polonaise… est la première victime de la crise. Ils seront 500 000 à perdre leur emploi entre 1931 et 1936. Tandis que l’Exposition coloniale verse dans une démesure spectaculaire, les immigrés sont relégués dans les mines, dans les usines, dans certains quartiers et logements, fichés par des documents administratifs ou des dossiers de surveillances et autres rapports de police… Le service des étrangers est le plus important de la Préfecture de police de Paris. Un exemple même pour les polices étrangères.
    La lumière de l’Exposition projette aussi dans l’ombre les « sujets de l’Empire » qui « importent en métropole les ambiguïtés et les contradictions du projet colonial français. » Entre les catégories de « français » et d’ « étranger », il faut créer la catégorie d’ « indigène » : ni tout à fait français ni tout à fait étranger. L’indigène est Français mais il n’est pas citoyen… ambiguïté qui perturbera plus d’un fonctionnaire de l’administration et autre recenseur… Ce sont des immigrés victimes déjà de « discriminations » : ils sont soumis à un régime particulier d’immigration, leur interdisant de venir en famille, leur fermant les portes de la naturalisation. Ils « bénéficient » même d’un service spécial de police, la fameuse Brigade nord-africaine créée en 1925.
    Mise en musique par une campagne de presse et certaines professions (avocats et médecins), relayée dans l’hémicycle national, la xénophobie gagne le pays. Les travaux de George Mauco et sa lecture raciale des populations lui offre même une caution « scientifique ». Les politiques d’immigration se durcissent. Comme on n’a rien inventé, déjà les responsables s’appliquent à fermer les frontières du pays et à renvoyer le plus possible d’immigrés présents en France. Le travailleur étranger des années 30 n’est qu’une force de travail dont le séjour est conditionné par son utilité économique. La préfecture de police de Paris veille et l’invention, en 1917, de la carte d’identité devient l’instrument essentiel d’une politique… d’ « immigration choisie » comme l’écrit Gérard Noiriel qui rappelle qu’« historiquement, l’exclusion des immigrants a précédé le combat pour l’ « intégration » ».
    Ainsi, les temps sont rudes pour celles et pour ceux qui, depuis près d’un siècle déjà, ont contribué - comme le montrent nombre de contributions - au développement économique, artistique et culturel, à la défense et à la régénération démographique de la France.
    Div041.jpgQu’importe ! Après la vogue des cabarets russes ou le succès de Joséphine Baker qui, en 1931, chante « j’ai deux amours, », après l’école de Paris (Modigliani, Chagall, Soutine ou Foujita) ou le mouvement surréaliste (Dali, Bunuel, Miro…), le visiteur s’esbaudit devant les premières manifestations d’un cosmopolitisme contemporain, expérimentant ce « goût des Autres » dont parle Benoit de l’Estoile.
    Tandis que l’œuvre coloniale est portée au pinacle à la Porte Dorée, une contre-exposition est organisée par les communistes aux Buttes-Chaumont. Les surréalistes pétitionnent et dénoncent le « concept-escroquerie (…) nouveau et particulièrement intolérable de la Grande France ». Au Jardin d’acclimatation du bois de Boulogne, des Kanaks de Nouvelle-Calédonie sont exhibés sous une forme qui rappelle les zoos humains. Lyautey, lui, s’efforce de ne pas flatter « la curiosité malsaine du public ».
    La police a fait son office, rien de vraiment sérieux n’est venu perturber la manifestation. Le lien entre l’empire et la grandeur de la France « irriguera la propagande de Vichy et participera de l’épopée de la France libre ». Pourtant, la France coloniale vit ses dernières années. Le 15 novembre 1931, les couleurs nationales sont montées pour la dernière fois. Les derniers projecteurs et lampions s’éteignent. Dans la nuit retrouvée, des hommes et des femmes se préparent à allumer d’autres feux. « Les feux du désespoir » pour reprendre Yves Courrières.
    Pas moins de 34 contributions et une iconographie nourrie de 195 affiches, photos, documents divers sont ici mis au service d’un projet qui multiplie les angles d’éclairage, les approches et les disciplines, rend compte des ambivalences, des contradictions, des potentialités d’un temps qui, même si cela doit déplaire aux rigoureux historiens, éclaire aussi l’actualité de ce début de siècle. Les textes et les photos consacrés à l’art et aux peintres, à la danse, aux affiches, au music-hall de variétés ou de revue, à la chanson sont nombreux. On aurait souhaité un éclairage sur l’évolution des produits et des habitudes alimentaires et surtout sur la vie littéraire, grande absente de ce beau et utile catalogue.

    Edition Gallimard-CNHI, 2008, 192 pages, 26€

  • Nedjma et Guillaume

    Renia Aouadène

    Nedjma et Guillaume

    Rania.jpgMarseillaise, enseignante en lycée professionnel dans les quartiers nord de la cité phocéenne, Renia Aouadène  signe ici son premier roman après un recueil de nouvelles et une pièce de théâtre parus chez le même éditeur.
    L’écriture sent sa salle de classe et le texte n’est pas exempt de passages surprenants ou de maladresses comme ce tout premier échange entre Nedjma et Guillaume : « je viens d’un pays où les mosquées se multiplient de jour en jour comme si elle pouvait se substituer au pain qui manque tant à mon peuple ! ». Bien, en guise d’entrée en matière, il faut désirer aller plus avant…
    Pourtant, le personnage de Nedjma prend forme. Nedjma est une Algérienne en vacances à Marseille. Dans une église, elle rencontre Guillaume, le prête du lieu. Elle, la musulmane y est entrée pour un moment de paix, lui, le prêtre, troublé, se surprend à quelques regards et élans nouveaux.
    Au creux de ce premier récit, se glisse une autre histoire, une autre femme : Djanina appartient à autre génération, celle de la guerre d’indépendance. Jeune, elle s’était engagée dans la lutte armée. Ces pages, souvent dithyrambiques et pompeuses, notamment pour la figure de Messali Hadj, sont sans originalité. Mais ici se niche, dans le secret d’une histoire familiale, le lien qui unit Nedjma et Guillaume : en prison, Djanina rencontra un médecin originaire des Cévennes avec qui elle eut un enfant. Ce fils d’un Roumi et d’une Algérienne vivra, élevé par la famille de Djanina. « Cet enfant (…) sera la preuve, la trace que notre amour fut un temps possible (…) » dit Djanina. Comme un lointain écho, Nedjma lui répond : « Si les Algériens pouvaient ! Il n’y a pas de peuple en ce monde qui soit issu d’un mélange aussi multiple. De nombreux conquérants ont traversé cette terre, certains sont restés, d’autres sont repartis mais nous avons intégré au fil des siècles toutes ces cultures. Nous sommes un et multiple. »
    L’histoire entremêlée de la France et de l’Algérie continue de s’écrire, incarnée par les liens que tissent, petit à petit, Nedjma et Guillaume. Entre eux il est d’abord question de discussions théologiques, du sort des femmes en terre d’islam - « parler avec les hommes tel est le problème dans les pays musulmans » - du retour obligé sur le mythe andalou et de l’Algérie de Bouteflika qui a « permis aux chiens de retourner dans leur niche pour y couler des jours heureux, avec la bénédiction des maîtres… telle est ma terre, nous n’en sortirons jamais ! » dit Nedjma.
    Bien trop démonstratif par endroits, l’intérêt du livre tient dans ce lien qui s’esquisse, les doutes et cette force souterraine qui poussent Nedjma et Guillaume irrésistiblement l’un vers l’autre, bousculant les tabous et bravant les interdits.
    Marsa est une maison d’édition spécialisée dans la littérature algérienne. Depuis bientôt seize ans, elle a publié bien des auteurs, jeunes dans la carrière ou confirmés. Elle édite également la revue Algérie Littérature Action.

    Edition Marsa, 2009, 92 pages, 13€
    Edition Marsa : 103, bd MacDonald 75019 Paris, www.algerie-litterature.com, marsa@free.fr

  • Des nouvelles de Kora

    Tassadit Imache

    Des nouvelles de Kora


    9782742782598.jpgDepuis son premier roman paru en 1989, Une fille sans histoire, Tassadit Imache traque, justement, ces « histoires » qui hantent le tréfonds de nos existences, souvent banales et absurdes. Elle n’a de cesse de remuer la vase de ces histoires de famille où pataugent des secrets, réels ou imaginaires, des incompréhensions, des blessures insoupçonnées, des ruptures et des bifurcations… Il est ici question de tout cela mais aussi de mémoire, d’identité, d’exil, d’enfants « bâtards » nés d’un couple franco-algérien, en pleine guerre d’Algérie, du rapport à l’Autre et du regard de l’Autre, avec pour toile de fonds, la grande histoire, celle de la France coloniale, de l’immigration, des banlieues, des relégations et autres représentations sociales et culturelles… 

    Le style comme la structure du récit sont sans complaisance et sans exhibition. Tassadit Imache ne fait pas la danse du ventre ! Si « le monde est plein de bouches mortes qui continuent à parler », ici chaque mot est pesé, chaque phrase charrie sens et image. L‘écriture, précise et cinématographique, décrit les doutes, les impasses, les dédoublements, les pertes d’identité, la quête de sens, la folie de Michelle, une taiseuse aux yeux pers, une taciturne qui ne sait pas danser la danse de la « mécanique sociale ». Cette fille d’un couple franco-algérien, née pendant la guerre d’Algérie, a été placée à l’âge de cinq ans dans un centre pour gamins dirigé par La Reine, une femme qui « n’use pas de ces mots qui sucrent la bouche de ceux qui les prononcentLa Reine consignait sur des cahiers d’écolier l’histoire de chacun de ses pensionnaires. Mais voilà ! « On avait le droit d’emporter son histoire ! Mais vous m’avez laissée sortir seule dans ma vie. Je me suis perdue dehors (…) ». De ce temps, lointain et si actuel, Michelle soupçonne sa mère de lui cacher un secret.
    Chaque jeudi, depuis dix ans, elle déjeune avec Robert, l’ami philosophe, dans un resto chinois du quartier de Belleville à Paris. Robert fit d’abord la connaissance de la mère de Michelle. Elle soutenait alors la lutte des Sans Papiers de Saint-Bernard. D’après sa fille, elle aurait toujours préféré « la compagnie des autres à celle de sa famille ». Michelle dresse une passerelle entre son enfance et celle de Robert : lui l’orphelin juif et elle d’une lignée de bâtards, l’âme travaillée par le sentiment d’abandon et le corps sentant toujours « l’odeur de la peur ».

    Michelle est écrivain. Elle travaille à un roman où Kora, « la femme au beurre rance », le personnage principal est, comme elle, une «  de ces bâtardes prêtes à vivre étouffés jusqu’à leur mort, les restes des leurs coincés dans la gorge pour survivre. » Kora-Michelle ; Michelle-Kora ; récit d’un dédoublement, d’un saut dans les mystères de l’enfance, d’une chute brutale et profonde, qui conduira Michelle à un long séjour dans un établissement psychiatrique et à ce lien d’ « enchantement » avec le Dr. P.
    La structure labyrinthique Des nouvelles de Kora illustre la place de l’expérimentation, du tâtonnement, du droit à l’erreur et aux retours en arrière, du primat de l’émotion sur la raison raisonnante, du mouvement et du devenir sur la fixité et la reproduction des identités, de l’invention de nos vies sur les assignations à résidence familiale, généalogique,  sociale ou culturelle. « Sans eux, les grands absents, serais-je devenue moi ? » Non, bien sûr, mais Michelle doit-elle pour autant restée prisonnière ? « Vivre c’est fabriquer de l’oubli et du mensonge » lui confie sa mère. « Dans la vie, il y a des mystères qui doivent rester mystérieux. » Ce livre sombre et difficile laisse échapper un rayon de lumière : « encourager à la vie peut ne pas être une entreprise vaine, n’est-ce pas ? Il faut que ma Kora parle enfin avec les gens ou elle coulera avec ses coups de dents, ses coups de griffes, au fond du fleuve ! ».


    Editions Actes Sud, 2009, 132 pages, 16€