Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Maintenant ils peuvent venir

Arezki Mellal
Maintenant ils peuvent venir


41DB83F8E0L._SS500_.jpgArezki Mellal signait à cinquante et un an son premier roman, un texte attachant malgré des maladresses et la présence de quelques propos inutilement polémiques sur les Algériens exilés ou les romanciers édités en France. Dans le contexte algérien, le titre n’augure rien qui vaille et les sombres prémonitions du lecteur seront finalement au rendez-vous. L’horreur - qui n’en finit pas malgré les silences médiatiques - rythme le quotidien de ce récit situé au début de la décennie quatre-vingt-dix.
Le narrateur traîne sa vie et plie sous la culpabilité que sa mère, diabétique à l’article de la mort, a pris soin, jour après jour d’entretenir. Ce poids trop lourd à porter l’empêche de vivre, annihile en lui toute volonté et enferme son devenir dans les rets des « injonctions » maternelles. Au point même que son mariage - ce qui convenons-en n’est pas chose rare - sera manigancé par sa mère et par Yasmina. « Yasmina m’a épousé » écrit le narrateur et, sans jamais rien avoir décidé ni désiré, cette jeune voisine si dévouée lui imposera deux enfants. A l’« impossible » tendresse maternelle répond cette « impossible » union. Zakia, sa collègue de bureau, un temps, fera battre son cœur, mais cette fois c’est l’amour qui sera « impossible ». Refusant toujours Yasmina, l’homme finira pas assumer ses responsabilités de père, jusqu’à endurer une autre et terrible culpabilité.
Ainsi, après avoir étouffé ses enfants, bouché tous les horizons et brouillé tous les héritages, il ne restait plus à ce pays qu’à les dévorer en associant à la plus sauvage des barbaries, les cruautés les plus sophistiqués dans l’art de répandre la désolation et la mort. Pourtant, l’Algérie d’Arezki Mellal ne se réduit ni à ces barbus qui pullulent et sèment la peur et l’effroi ni à ce « Bled Mickey » où tout va de guingois (misère, saleté, pénuries, absence de mixité, frustration affective...). Arezki Mellal montre « un peuple qui se débrouille seul face au terrorisme », d’où émergent des d’individualités attachantes, nobles et profondément humaines comme Ammi Slimane, le jardinier amoureux, qui vit sa foi dans la simplicité et la paix de l’âme, ou Salah, le vieux militant communiste. Il y a aussi et surtout ces femmes qui, dans l’anonymat mais toujours héroïquement, résistent, à l’image de Yasmina, impénétrable, digne et forte, toujours debout malgré le malheur qui ne l’épargne pas.

Edition Actes Sud, 2002, 202 pages, 15,90 €

Les commentaires sont fermés.