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Ce livre va vous sauver la vie

A.M.Homes

Ce livre va vous sauver la vie


AM-Homes-photographed-in--010.jpgFaut-il prendre ce titre au sérieux ? Particulièrement rebutant pour les uns, plutôt attractif pour d’autres, il cache un roman picaresque, trépidant de bout en bout, écrit avec la légèreté et la vivacité d’un papillon volant autour d’un certain Richard Novak, témoin de ses aventures, tantôt improbables tantôt prosaïques.

Notre héros est un richissime et génial homme d’affaires, un tantinet misanthrope, vivant en vase clos dans sa luxueuse villa des hauteurs de Los Angeles. Son quotidien est réglé comme du papier à musique : levé à l’aurore, consultation des cours de la bourse pendant qu’il fait son jogging sur un tapis, coach à domicile, diététicienne à domicile, ration alimentaire à domicile, spiruline et autres vitamines à domicile, et même un casque doté d’écouteurs pour éviter d’avoir à parler avec la femme de ménage… La caricature parfaite d’un être déshumanisé. Il vit séparé de sa femme, new-yorkaise, professionnelle de l’édition, qui consacre tout son temps à son métier. Il ne voit plus son rejeton de fils, doublement livré à lui-même. Quant à son frère et à ses parents…

Mais voilà, Richard Novak approche de la cinquantaine. Le livre s’ouvre sur une crise et une hospitalisation high-tech et en urgence. Le lecteur tout comme le premier intéressé ignorent s’il s’agit d’une attaque cardiaque ou d’une autre faiblesse, serait-ce la somatisation d’un début de dépression ou la conscience de la finitude naissant avec l’avancée en âge ? Quoi qu’il en soit, Richard Novak quittera l’hôpital armé de cette seule ordonnance : « Pas la peine de ruminer tout ça - acceptez-le. Quelque chose s’est produit, simplement nous ne savons pas quoi. (…) Pour l’instant vous n’êtes pas en train de mourir, c’est bien, c’est l’essentiel. Vous avez le temps. (…) Jusque-là toute information est bonne à prendre. » Devant sa maison, un glissement de terrain provoque l’apparition d’un trou. Au fur et à mesure qu’il se creuse et qu’il s’élargit, la maison s’affaisse et menace de tomber.

A partir de cet événement, l’existence de Richard Novak va prendre un tout autre cours. Il s’interroge, revient sur son existence, ses liens avec les siens, à commencer avec son fils. Lui qui se nourrissait de céréales aux allures de « copeaux de bois » et de lait sans lactose se met à dévorer donuts et pizzas, boire du whisky et fumer quelques joints. Il multiplie les rencontres hier encore impossibles à seulement envisager : un immigré indien entreprenant, une femme au foyer déprimée, une star de cinéma, une idole des années 70… Il se remet même à faire l’amour ! Il passe quelques jours chez son frère, héberge son fils, retrouve son ex dont il est toujours épris…

Mais ce n’est pas tout : Il sauve un cheval, délivre une pauvre femme kidnappée dans un coffre de voiture,  visite les pensionnaires d’un hospice, s’adonne  le temps d’un stage à une semaine de silence et de méditation...

Au cœur de toutes ses aventures et rencontres : la naissance d’un altruisme nouveau, une compassion pour ses semblables, le souci des siens (et de soi), le retour à une humanité perdue.

Porté par des dialogues savoureux, tout ici file à vive allure, tient en haleine, sans jamais adopter un ton gnangnan ou des accents pour lecteurs macrobiotiques décharnés et haut-perchés. Il s’agit bien d’une satire drôle et humaine d’une société qui a placé au centre de ses valeurs le travail et l’argent - la Rolex au poignet ! -  l’indifférence et le tout à l’ego. Alors faut-il prendre au sérieux le titre de ce roman ? Sans doute que oui, en tout cas pour l’auteur, il ne doit pas seulement s’agir d’un simple clin d’œil…

 

Traduit de l’américain par Yoan Gentric, Actes Sud 2008, 447 pages, 23€

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