Malek Abbou
Métanoïa
En ouvrant Métanoïa, le lecteur se demande où il met les pieds. Intrigué d’abord par une prose délirante et bouffonne, des références aussi nombreuses que diverses (histoire, philosophie, économie, science physique, biogénétique, géostratégie paléontologie, œnologie...) le tout agrémenté de moult citations latines, il reste perplexe face à un texte touffu que l’éditeur présente pompeusement comme « une nouvelle expression romanesque » et qui n’est en fait que le premier roman d’un lyonnais de trente-cinq ans. Passé les premières surprises et le fait que l’auteur, comme l’un de ses personnages, ne soit pas toujours évident à « déchiffrer ligne à ligne », l’intrigue, petit à petit, prend forme.
Dans une Europe menacée par les délires fanatiques d’un complot théocratique fomenté par Buxton, un riche aristocrate britannique et un monde victime de l’abrutissement généralisé au nom de la marchandisation néolibérale de tous les rapports, les membres de Métanoïa, organisation secrète et fraternelle, veillent et s’appliquent à contrecarrer ces funestes ambitions et cette triste déshumanisation. L’agent Dorvillien a infiltré l’organisation de Buxton. Il a en charge de détruire « l’Elfe », une arme de destruction redoutable, « un transducteur (...) capable de réduire l’Annapurna en sucre glace » , Vallier. Pendant ce temps, son supérieur en désorganisation, s’applique à mettre la pagaille sur les marché financiers de la planète, une planète qui ignore encore que l’« hypospermie » menace l’espèce de disparition. Contre l’extinction, certains préparent l’avènement d’une « spermatocratie sino-américaine », quand d’autres concoctent l’effrayant projet d’une humanité choisie, d’une reprogrammation génétique de l’espèce humaine grâce à la « fabrication du premier spermatozoïde transgénique humain » où le vieux Houellebecq figurerait le modèle standard de l’écrivain. Métanoïa ne manque pas d’imagination... Et il en faut pour qu’une poignée de vieux fous, amoureux épris de danse et démolisseurs des mythes qui fondent notre rationalité, puisse, aidée d’une simple relique, un foulard encore imprégné de la sueur du King, Elvis Presley soi-même, sauver le monde.
Edition Hachette Littératures, 2002, 251 pages, 18,50 €