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La citation du jour

« J’avais oublié que l’amour vient de la tête et non pas du cœur. De tout le corps, seule la tête importe. Il suffit de toucher la tête d’un Vietnamien pour l’insulter, non seulement lui mais tout son arbre généalogique. C’est ainsi qu’un timide Vietnamien de huit ans s’est transformé en tigre furieux quand son coéquipier québécois  a frotté le dessus de sa tête pour le féliciter d’avoir attrapé son premier ballon de foot. Si une marque d’affection peut parfois  être comprise comme une offense, peut-être que le geste d’aimer n’est pas universel : il doit aussi être traduit d’une langue à l’autre, il doit être appris. Dans le cas vietnamien, il est possible de classifier, de quantifier le geste d’aimer par des mots spécifiques : aimer par goût (thich), aimer sans être amoureux (thuong), aimer amoureusement (yêu), aimer avec ivresse (me), aimer aveuglément (mù quang), aimer par gratitude (tinh nghia). Il est donc impossible d’aimer tout court, d’aimer sans sa tête.  J’ai de la chance d’avoir appris à savourer le plaisir de lover ma tête dans le creux d’une main, et mes parents ont de la chance de pouvoir capter l’amour de mes enfants  quand ces derniers leur donnent des baisers dans les cheveux, spontanément, sans protocole, pendant une session de chatouilles au lit. Moi, j’ai touché la tête de mon père qu’une seule fois. Il m’avait ordonné de m’appuyer sur lui pour sauter par-dessus la rampe du bateau ».


 

Kim Thuy, Ru, Liana Levi 2010

 

 

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