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French Dream

Mohamed Hmoudane

French Dream 

 

hmoudane.jpgTandis qu’on traque le réfugié afghan du côté de la « jungle » de Calais pour, selon l’officielle version, le protéger des passeurs, on continue à croire ici ou là que ces hommes, ces femmes et même ces enfants qui débarquent sur le sol de l’Europe sont en quête d’un Eldorado. Certains laissent même entendre qu’ils seraient prêts à tout pour rester, bien au chaud, et profiter de la douceur de cette bonne terre de France. Mohamed Hmoudane est poète et l’auteur de plusieurs recueils, French Dream est son premier roman paru en 2005. Il y raconte les tribulations d’un candidat à l’émigration et ses galères dans cette France tellement rêvée. Une fois de plus rien de bien nouveau sous le soleil si ce n’est l’impression d’un texte qui s’essouffle sur la distance et des propos qui pourraient choquer le moins moraliste des lecteurs. Il faut dire que Mohamed Hmoudane place son texte sous les auspices d’une citation de Jean Genet : « les romans ne sont pas des rapports humanitaires. Félicitons nous, au contraire, qu’il reste assez de cruauté, sans quoi la beauté ne serait pas ». Le lecteur est ainsi, d’entrée, averti. Après des tentatives contestataires vouées à l’échec dans une société marocaine policée et cadenassée par un pouvoir autoritaire, « je n’avais plus qu’une seule idée en tête, dit le narrateur, : partir, d’autant plus que l’atmosphère chez nous était devenue de plus en plus insupportable, plus que pesante. Nous étions comme frappés par un malheur indicible ».

Ledit narrateur réussit à débarquer en France. Hébergé par son frère Adam, il va faire mille et un boulots pour essayer de s’en sortir. Mais notre héros qui n’a rien de vraiment positif (pour le moins) empoche la recette des ventes militantes effectuées pour le compte du Parti et n’a qu’un objectif : obtenir sa carte de dix ans. Pour ce faire, il est près à tout. Il tente sa chance avec Christelle, mais au bout de trois mois il doit déchanter : « Tous mes châteaux de sable s’effondraient l’un après l’autre brusquement. D’une naïveté extrême, je lorgnais non seulement sur la carte de dix ans mais aussi, à long terme, sur l’héritage (…) ». C’est avec Karine qu’il va convoler en justes noces et ainsi pouvoir régulariser sa situation administrative ce qui n’empêche nullement les propos critiques sur le masque de l’intégré revêtu pour faire bonne figure, dans le couple, avec les amis, avec les collègues bien évidemment laïques du collège…

Tout cela va se solder par un divorce et un retour fissa au Maroc. Après quelques illusions laissées au vestiaire et une dose supplémentaire de bile déversée, retour à Saint-Denis : « C’est là où je vis le mieux ma condition d’« indigène ». Je vous laisse cogiter cette équation trop évidente ou alors pas assez : Paris = métropole / Banlieue = ancienne colonie… ». Voilà qui est peu originale et démago à souhait. Le texte avance, un brin pompeux (« Écrire c’est aussi payer, mots et phrases sonnants, le prix fort de la liberté »). Un premier texte nourri peut-être plus par le ressentiment que par la cruauté et qui se termine sur cette confidence : noircir les pages du livre « était pour moi une question de vie ou de mort. De vie surtout. Cette dernière phrase faut peut-être tout le livre (sic) ». Fonction « vitale », prophylactique donc de la littérature. Pour l’auteur s’entend. Au centre de ce triangle souvent tragique formé par l’exil, la vie et la mort, le personnage de Bilal Kayani dans Welcome de Philippe Lioret apparaît plus consistant. Plus représentatif aussi.

 

Edition de la Différence, 2005, 123 pages, 14€

 

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